Résumé |
| La seconde guerre mondiale a été gagnée en 1947 par l'Axe, et l'ouest des Etats-Unis vit calmement sous l'occupation japonaise. Les Japonais collectionnent les antiquités yankees, donnant lieu à un juteux trafic de fausses pièces authentiques. Et très nombreux sont ceux qui consultent un oracle, le Yi-King ou Livre des Changements, afin de les aider à prendre une décision importante.
La seule fausse note à cet ordre apparent semble être La Sauterelle Pèse Lourd, roman d'un certain Hawthorne Abendsen qui décrit un univers parallèle dans lequel les Alliés ont remporté la victoire en 1945. Bien qu'interdit chez les Nazis, tout le monde, à commencer par les Nazis eux-mêmes, lit ce roman.
L'antiquaire Robert Childan ne l'a pas lu. Il se prétend trop occupé par ses affaires : vendre aux Japonais ces objets historiques dont ils raffolent. Il considère que la race blanche est supérieure, mais se comporte obséquieusement avec l'occupant.
Nobusuke Tagomi est un des clients de Childan. Attaché commercial, taoïste convaincu, il doit composer entre ses devoirs bureaucratiques et ses convictions morales.
Frank Frink fabrique des faux objets historiques (qui se retrouvent parfois dans le magasin de Childan). Il vit dans la peur de tomber aux mains des nazis, car il est juif.
Son ex-femme Juliana, elle, est à la fois légèrement paranoïaque vis-à-vis des hommes et incapable de se passer de compagnie masculine. La liaison qu'elle entame avec ce bizarre routier italien va la mener jusqu'à Abendsen.
Ce sont les principaux personnages, dont les actes, les décisions, la force ou la faiblesse morale, vont affecter leurs semblables, voire le monde. Et leur perception de ce monde va s'en trouver modifiée.
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Remarques |
| Prix Hugo 1963
Premier roman de l'histoire américaine à se référer au Yi-King.
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Une page |
| [Wyndam-Matson, patron de Frank Frink, à sa maîtresse :] — Je vais t'expliquer, dit-il. Tout cette histoire d'authenticité ne veut rien dire. Ces Japonais sont des cloches. Je le prouverai. Il se leva, se précipita dans son bureau et revint avec deux briquets qu'il posa sur la table. — Regarde ça. Ils ont l'air identiques, n'est-ce pas ? Eh bien écoute ! Il y en a un qui a de l'historicité en lui. (Il lui fit une grimace.) Prends-les en main. Vas-y. L'un des deux vaut peut-être quarante mille ou cinquante mille dollars sur le marché des collectionneurs. La fille prit les deux briquets avec précaution et se mit à les examiner. — Tu ne sens donc pas ? dit-il sur le ton de la plaisanterie. L'historicité ? — Qu'est-ce que c'est que ça, l'historicité ? — On dit cela d'une chose qui contient quelque chose appartenant à l'Histoire. Ecoute. L'un de ces briquets Zippo se trouvait dans la poche de Franklin D. Roosevelt quand il a été assassiné. Et l'autre n'y était pas. L'un a de l'historicité à un point terrible ! Autant qu'un objet a pu jamais en contenir. Et l'autre n'a rien. Tu le sens ? (Il lui donna un coup de coude.) Non ? Tu ne vois aucune différence. Il n'y a pas de « présence plasmique mystique » ni d'« aura » autour de cet objet ? — Mon Dieu ! dit la fille avec un respect mêlé de crainte. C'est bien vrai ? Il avait l'un de ces briquets sur lui ce jour-là ? — Sûrement. Et je sais lequel. Tu vois où je veux en venir ? Tout cela, c'est une vaste escroquerie ; ils se jouent la comédie à eux-mêmes. Je veux dire par là, un revolver s'est trouvé dans une bataille célèbre, l'Argonne par exemple, et il est le même que s'il ne s'y était pas trouvé, à moins que tu ne le saches. Ca se passe là, dit-il en se touchant le front. Dans l'esprit, pas dans le revolver.J'ai été collectionneur autrefois. C'est comme ça d'ailleurs que je suis entré dans ce genre d'affaires. Je collectionnais les timbres. Les colonies britanniques de l'époque la plus ancienne. La fille était à la fenêtre, les bras croisés ; elle regardait les lumières du centre de San-Francisco. — Papa et maman disaient toujours qu'on n'aurait pas perdu la guerre s'il avait vécu, dit-elle. — D'accord. (Mais Wyndam-Matron suivait son idée :) Suppose maintenant que l'an dernier le gouvernement du Canada où n'importe qui ait retrouvé les planches ayant servi à l'impression d'un vieux timbre. Et l'encre. Et un approvisionnement de ... — Je ne crois pas que ni l'un ni l'autre de ces deux briquets ait appartenu à Franklin Roosevelt, dit la fille. — C'est là le point ! dit Wyndam-Matson avec un petit rire. Il faut que je te le prouve au moyen d'un document quelconque. Un papier établissant son authenticité. Et ainsi, tout est faux, une tromperie collective. Le papier prouve la valeur de l'objet, et non pas l'objet lui-même ! [ chapitre 5, page 62 de l'édition Omnibus ]
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Commentaire de l'auteur |
| [...] Il me fallait m'élever à un niveau que ni moi ni personne n'avait jamais atteint... [...] J'ai étudié le national-socialisme jusqu'à sentir que je pouvais voir le monde comme le voyaient les nazis. [commentaire complet] | |
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Publications françaises |
- Club du Livre d'Anticipation n° 24, Opta, 1970 (en volume double avec Dr Bloodmoney)
- J'Ai Lu n° 567, 1974. [trad. Jacques PARSONS] ISBN: 2-277-12567-9
- in SUBSTANCE RÊVE, collection Omnibus, Presses de la Cité, 1992. ISBN: 2-258-03696-8
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Liens externes |
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